
Alien, la résurrection reste l’un des chapitres les plus controversés et discutés de la célèbre saga Alien. Sorti en 1997, ce quatrième volet a déchainé les passions, entre admirateurs passionnés et détracteurs sévères. Alors que la franchise science-fiction et horreur naviguait jusque-là entre chefs-d’œuvre cultes et épisodes plus chaotiques, le film de Jean-Pierre Jeunet propose un virage audacieux et esthétique qui ne s’accorde pas avec les codes des précédents longs-métrages. Plusieurs dizaines d’années plus tard, alors que la pop culture évolue et que le regard sur le cinéma se nuance, une réévaluation de ce film s’impose.
Découvrons ensemble pourquoi ce film mérite un regard neuf, en plongeant dans ses aspects artistiques, sa production chaotique, son accueil mouvementé et son héritage ambivalent.
Après un Alien 3 largement décrié et marqué par une production chaotique, 20th Century Fox voulait relancer la saga avec un nouvel élan. Pourtant, présenter un quatrième film était un défi de taille, notamment parce qu’Ellen Ripley, l’héroïne emblématique incarnée par Sigourney Weaver, avait trouvé la mort dans le troisième opus.
Les studios envisagèrent d’abord de créer un récit centré sur un autre personnage, notamment sur le clone de Newt, mais le public et la production souhaitaient absolument le retour de Ripley. Pour écrire ce nouveau chapitre, Fox engagea Joss Whedon, alors en plein succès avec la série Buffy contre les vampires et reconnu comme un expert des dialogues incisifs et des personnages féminins forts. Whedon explique lui-même en 2005 qu’il avait d’abord conçu un scénario radicalement différent, mais qu’il fut contraint par la production de réintégrer Ripley dans l’histoire.
Plusieurs versions du script se succédèrent, avec des fins ancrées dans des univers aussi variés que des forêts étranges, des décharges futuristes ou des déserts martiens, avant que ne soit finalement retenue une action dans un vaisseau spatial lointain, coupé de la Terre. Cette instabilité scénaristique témoigne des nombreux arbitrages artistiques et budgétaires imposés au projet, entre contraintes techniques et négociations créatives.
Parallèlement, le réalisateur français Jean-Pierre Jeunet, reconnu pour son univers poétique et délirant (Delicatessen, La Cité des enfants perdus), fut finalement choisi, marquant une rupture esthétique radicale. Ce choix fut loin de faire l’unanimité dans une industrie hollywoodienne souvent frileuse face aux projets étranges, mais entraîna une reconfiguration visuelle et narrative du film qui fait encore débat.
Jean-Pierre Jeunet ne cache pas son intention de s’approprier entièrement le monde Alien, y développant un univers à la fois esthétique et sensoriel très marqué — un savant mélange entre bizarrerie et technologie futuriste. L’ambiance gothique et les jeux de lumière signés Darius Khondji plongent le spectateur dans un décor moite, parfois oppressant, mais aussi irrésistiblement fascinant.
À l’antithèse des couloirs clairs-obscurs typiques de la franchise, le réalisateur investit ses scènes d’expérimentations visuelles audacieuses, comme la mentionnée ambiance bleue éclatante dans la salle des cuisines inondées, ou l’éclairage jaune vif des laboratoires, créant un choc chromatique saisissant. Ces choix visuels contribuent à une atmosphère à la fois étrange et déstabilisante, qui déplaît autant qu’elle intrigue.
Exemple d’œuvres d’art vidéographiques, Jeunet introduit aussi une certaine excentricité dans la mise en scène des créatures, privilégiant l’exposition frontale des xénomorphes avec leur bave brillante et un bestiaire inquiétant, allant jusqu’à un hybride humain-alien albinos à la fin du film, qui brouille les frontières entre monstre et humain.
La photographie et les décors détonnent par leur originalité, mais sont également responsables de la scission des fans et critiques, certains y voyant un renouvellement bienvenu, d’autres une dérive incohérente. Néanmoins, cet univers visuel reste un des points forts à redécouvrir dans une perspective 2025, lorsque les effets spéciaux numériques ont irrémédiablement changé le paysage cinématographique.
La constellation du film repose inévitablement sur le personnage central, Ellen Ripley, interprété par Sigourney Weaver avec un engagement déroutant. Loin de la survivante rugueuse et combative que le public connaît, la Ripley de La Résurrection est un clone né 200 ans après sa mort, portant encore dans ses gènes le parasite alien qui l’habitait.
Cette Ripley hybride évolue en une figure sensible, presque reptilienne, mélange d’humanité et de monstruosité latente, déconcertante pour les fans qui attendaient une Ellen fidèle à l’héroïne forte des premiers films. Signalons que Sigourney Weaver, en plus d’être actrice, fut co-productrice, reflétant l’importance capitale de son rôle iconique dans la saga.
Son rôle dans Alien, la résurrection est un acte de renouvellement, qui ne fait pas forcément l’unanimité mais qui montre la capacité du cinéma à explorer la complexité et la transformation d’une figure mythique. Dans certains cas, cette Ripley possède des séquences marquantes, lorsque ses clones se confrontent ou quand elle doit affronter son propre enfant hybride alien, un mélange foisonnant de symboles sur la maternité, le corps et l’identité.
Cet aspect de réinvention soulève de nombreux débats sur l’évolution des personnages cultes dans les franchises et leur adaptation aux nouvelles tendances du cinéma. On peut rapprocher cette tendance de la mutation des héros classiques dans d’autres univers contemporains tels que ceux évoqués pour des meilleures séries animation ou meilleurs jeux de rôle qui poussent aussi à renouveler les codes narratifs.
À sa sortie, Alien, la résurrection fut la cible d’une critique souvent très dure. Des spécialistes renommés n’ont pas mâché leurs mots : Libération l’a jugé «un film éprouvant, nullement inquiétant », tandis que Roger Ebert a déclaré qu’«il n’y a pas un seul plan qui puisse émerveiller». Ces jugements mettent en lumière une incompréhension entre les attentes du public et la vision singulière de Jeunet.
Globalement, le film accuse un recul au box-office américain, avec moins de 50 millions de dollars, soit la plus mauvaise performance de la série, loin derrière Aliens – Le retour ou Prometheus. Pourtant, à l’échelle mondiale, les recettes s’élèvent à environ 160 millions, ce qui reste honorable compte tenu de la situation conflictuelle entourant le projet.
Une liste non exhaustive des critiques sévères et controversées contre le film :
Face à cet accueil, Sigourney Weaver se fit la voix de la défense, illustrant l’investissement et le désir d’apporter une nouvelle profondeur à Ripley, allant jusqu’à défendre le réalisateur. Elle affirma que ce film devait être vu sous un autre angle, en tant que réinvention ambitieuse mais dérangeante.
Les regards décalés du public ont ouvert la voie à une relecture plus récente, plus apaisée, dans un monde où la nostalgie alterne avec une volonté de comprendre la démarche artistique à l’œuvre. Cela est perceptible si l’on scrute des revues spécialisées, des forums de fans ou des publications rétrospectives.
En dehors de Ripley, Alien, la résurrection présente un casting éclectique de personnages secondaires, qui ajoutent brio et singularité à la dynamique du film. Ces figures, souvent atypiques, donnent de la couleur à l’univers sombre et tendu dans lequel ils évoluent.
Parmi eux, on retrouve Dominique Pinon dans un fauteuil roulant futuriste, Winona Ryder interprétant un androïde et Michael Wincott en mercenaire solitaire. Ces personnalités reflètent une esthétique à la fois intrigante et décalée, proche de la veine « Firefly » ou encore des films de type Hellboy.
Cette équipe composée presque comme une bande de hors-la-loi navigue dans un vaisseau-ruche où les intérêts se croisent et s’affrontent, souvent avec tension et humour noir. Ces éléments dynamisent le récit, même si le scénario présente parfois des incohérences ou des passages faibles.
Malgré cette richesse, certains ressorts narratifs semblent forcés ou caricaturaux, ce qui a contribué à la dissension critique. Néanmoins, cette pluralité offre une profusion d’éléments pour les amateurs de la franchise, souhaitant explorer les dessous des conflits et relations humains-alien avant les événements de films incontournables zombies ou de nouvelles intrigues plus contemporaines.
La bande originale signée John Frizzell mérite une attention particulière. Dans un univers où l’angoisse et l’étrange cohabitent, sa musique réussit à équilibrer tension et mystère sans tomber dans l’ostentation. Ce travail musical participe largement à l’atmosphère singulière du film, renforçant l’immersion du spectateur dans ce monde à la fois futuriste et dérangé.
Voici pourquoi la partition de Frizzell mérite d’être réexaminée :
La bande-son contribue à faire de Alien, la résurrection une œuvre plus complexe que celle perçue à sa sortie, invitant à un véritable voyage auditif qui rend la réévaluation du film passionnante.
Plutôt que de voir Alien, la résurrection comme une anomalie, il faut l’envisager comme un possible aboutissement et une réinterprétation à sa manière d’un univers qui, dès le départ, a toujours promu la liberté du réalisateur pour explorer des territoires inédits.
La tradition de la série a toujours voulu donner carte blanche à ses réalisateurs, de Ridley Scott à David Fincher, chacun apportant sa touche personnelle souvent très décalée. Dans ce sens, jeunet s’inscrit pleinement dans cette veine, brisant la linéarité pour injecter une dose d’étrangeté et d’innovation.
Assumant les critiques, le film s’élève désormais comme un objet de curiosité, un palier artistique souvent éclipsé mais que les fans de cinéma science-fiction devraient revisiter, en s’appuyant aussi sur les nombreuses analyses disponibles sur des plateformes spécialisées pour les aficionados de la franchise comme sur superman ages cinema.
Alors que le monde du cinéma continue de s’adapter aux nouvelles technologies et que les franchises reviennent souvent au devant de la scène avec des reboot ou des suites, Alien, la résurrection offre une occasion unique de revisiter une œuvre qui a marqué un tournant artistique et narratif dans la saga.
La relecture de ce film aujourd’hui bénéficie à la fois :
Finissons cette exploration avec un regard renouvelé sur cette œuvre désormais culte, symbole d’une franchise qui n’a pas peur de prendre des risques.