Les inoubliables Terence Hill et Bud Spencer ont formé l’un des duos les plus emblématiques du cinéma européen des années 70 et 80. Avec leurs bagarres chorégraphiées, leurs répliques cultes et leur alchimie comique unique, ces deux acteurs ont créé un véritable sous-genre cinématographique: le film “à baffes”. De leurs débuts dans les westerns spaghetti jusqu’à leurs comédies urbaines, ces deux géants ont enchaîné les succès populaires qui continuent aujourd’hui encore à faire rire plusieurs générations. Leur filmographie commune, riche de dix-sept collaborations, raconte l’histoire d’une amitié tant à l’écran que dans la vie, qui a su traverser les époques et les modes pour s’inscrire dans le patrimoine cinématographique mondial.
L’âge d’or du western spaghetti: naissance d’un duo légendaire
La rencontre entre Terence Hill et Bud Spencer s’inscrit dans le contexte particulier du cinéma italien des années 60. À cette époque, le western spaghetti connaît son apogée grâce au succès phénoménal des films de Sergio Leone comme “Le Bon, la Brute et le Truand”. C’est dans ce cadre fertile que Mario Girotti (futur Terence Hill) et Carlo Pedersoli (futur Bud Spencer) se croisent pour la première fois sur le tournage de “Dieu pardonne… moi pas!” en 1967, sous la direction de Giuseppe Colizzi.
Cette première collaboration marque le début d’une aventure cinématographique exceptionnelle, bien que les deux acteurs n’aient pas encore adopté les pseudonymes qui les rendront célèbres. Ce n’est qu’à partir de leur deuxième film ensemble, “Les Quatre de l’Ave Maria” (1968), que leurs noms de scène s’imposent définitivement. Terence Hill choisit un nom à consonance anglo-saxonne pour faciliter sa carrière internationale, tandis que Carlo Pedersoli opte pour Bud Spencer, en hommage à la bière Budweiser et à l’acteur Spencer Tracy.
Le western spaghetti, avec ses codes revisités et son approche plus ironique du mythe de l’Ouest américain, offre un terrain de jeu idéal pour ces deux acteurs aux physiques si contrastés. D’un côté, Terence Hill, blond aux yeux bleus perçants, incarne l’agilité, la ruse et l’espièglerie; de l’autre, Bud Spencer, imposant et bourru, représente la force brute et le pragmatisme. Ce duo improbable va rapidement trouver sa formule magique avec “On l’appelle Trinita” en 1970.
Réalisé par Enzo Barboni (sous le pseudonyme de E.B. Clucher), ce film révolutionne le genre en y injectant une dose massive d’humour. Hill y interprète un vagabond fainéant mais redoutable tireur, tandis que Spencer campe son demi-frère bourru devenu shérif malgré lui. Le succès est immédiat et phénoménal: plus de 6 millions de spectateurs en Italie, des salles combles en France et en Allemagne. La recette est trouvée: des bagarres spectaculaires où les deux héros distribuent des baffes à tour de bras, des situations comiques et une complicité évidente entre les deux acteurs.
- Dieu pardonne… moi pas! (1967) – Leur première collaboration
- Les Quatre de l’Ave Maria (1968) – La confirmation du duo
- La Colline des bottes (1969) – Consolidation de leur image
- On l’appelle Trinita (1970) – Le film qui définit leur style
- On continue à l’appeler Trinita (1971) – La suite qui confirme le succès
La saga Trinita marque un tournant majeur dans le western européen en y introduisant une dimension comique assumée. Ces films rejettent la violence gratuite typique du genre pour privilégier une approche plus légère, où les héros règlent généralement les conflits à coups de poing plutôt qu’à coups de revolver. Cette nouvelle approche séduit un public familial et permet au duo de se démarquer dans un genre déjà saturé.
Dans ces westerns, on trouve déjà tous les ingrédients qui feront le succès de leur filmographie: les scènes de repas gargantuesques où Bud Spencer engloutit des quantités impressionnantes de nourriture, les bagarres chorégraphiées où les méchants volent littéralement à travers la pièce, et bien sûr cette alchimie unique entre les deux acteurs, faite de chamailleries constantes mais aussi d’une indéfectible solidarité face à l’adversité.
Film | Année | Réalisateur | Particularité |
---|---|---|---|
Dieu pardonne… moi pas! | 1967 | Giuseppe Colizzi | Première collaboration |
Les Quatre de l’Ave Maria | 1968 | Giuseppe Colizzi | Adoption des pseudonymes |
La Colline des bottes | 1969 | Giuseppe Colizzi | Dernier film de la trilogie Colizzi |
On l’appelle Trinita | 1970 | E.B. Clucher | Premier grand succès commercial |
On continue à l’appeler Trinita | 1971 | E.B. Clucher | Confirmation du succès |
Le film “La Colline des hommes perdus” (aussi connu sous le titre “Boot Hill”), sorti en 1969, complète la trilogie de Colizzi commencée avec “Dieu pardonne… moi pas!”. Dans ce western plus sombre que leurs futures comédies, Hill et Spencer affinent déjà leur dynamique de duo contrasté qui deviendra leur marque de fabrique. Bien qu’encore ancré dans les codes traditionnels du western spaghetti, ce film annonce déjà l’évolution à venir vers un ton plus léger.
Les années 70: l’apogée du duo et la diversification des genres
Fort du succès phénoménal des films Trinita, le duo Hill-Spencer entame les années 70 avec une notoriété internationale. Les producteurs italiens, conscients de tenir une formule gagnante, vont multiplier les projets pour capitaliser sur la popularité de ces deux acteurs. C’est le début d’une période extraordinairement prolifique où le tandem va tourner pas moins de dix films ensemble en une décennie, tout en diversifiant progressivement les genres abordés.
Si le western avait été leur terrain de prédilection, les années 70 voient le duo s’aventurer dans des univers plus contemporains. Cette transition s’opère avec “Maintenant, on l’appelle Plata” (1972), qui transpose la dynamique des deux compères dans un cadre sud-américain. Terence Hill y incarne un escroc de haut vol tandis que Bud Spencer joue un mécano bourru embarqué malgré lui dans une aventure rocambolesque. Le succès est au rendez-vous, prouvant que la magie du duo fonctionne indépendamment du cadre western.
Cette diversification se poursuit avec des films comme “Deux super-flics” (1977), où ils incarnent deux amis d’enfance que le destin a placé dans des camps opposés: l’un est devenu policier, l’autre voleur. Réunis par les circonstances, ils finissent par faire équipe pour déjouer un trafic de drogue. Ce film, qui alterne poursuites automobiles spectaculaires et bagarres hilarantes, devient l’un des plus grands succès du duo. La scène d’ouverture, où Terence Hill poursuit des malfrats en deltaplane au-dessus de Miami, reste dans les annales du cinéma populaire italien.
L’année 1978 voit la sortie de “Pair et Impair”, nouvelle variation sur le thème du duo mal assorti forcé de collaborer. Hill y joue un agent secret chargé d’infiltrer un réseau de joueurs illégaux avec l’aide d’un docker bagarreur interprété par Spencer. Le film, tourné en partie à Miami, confirme l’internationalisation de leur carrière et leur capacité à renouveler leur formule tout en conservant leurs marques de fabrique.
- “…continuavano a chiamarlo Trinità” (1971) – Consolidation de leur image de marque
- “Maintenant on l’appelle Plata” (1972) – Première incursion hors du western
- “Les Deux missionnaires” (1974) – Parodie de film historique
- “Deux super-flics” (1977) – Leur entrée dans le genre policier comique
- “Pair et Impair” (1978) – Mélange d’espionnage et de comédie
- “Cul et chemise” (1979) – Aventures africaines
Un aspect remarquable de cette période est la fidélité du duo à certains réalisateurs, notamment E.B. Clucher (Enzo Barboni) et Giuseppe Colizzi, qui comprennent parfaitement comment mettre en valeur leur alchimie. Cette continuité dans la collaboration permet d’affiner film après film la formule qui fait leur succès. Les scènes de bagarres deviennent de plus en plus élaborées, véritables chorégraphies comiques où les méchants volent littéralement à travers les décors.
Le film “Les Généraux” (1976), moins connu que d’autres collaborations du duo, mérite une mention spéciale pour son cadre historique inhabituel. Situé pendant la guerre civile américaine, il offre une variation intéressante de leur formule en les plaçant dans un contexte militaire. Bien que n’ayant pas connu le même succès que leurs autres films, il témoigne de leur volonté d’explorer différents univers tout en conservant leur dynamique comique caractéristique.
Évolution du duo | Années 60 | Début 70s | Fin 70s |
---|---|---|---|
Genre dominant | Western spaghetti | Western comique | Comédie d’action contemporaine |
Dynamique entre personnages | Partenaires de circonstance | Frères rivaux | Duo complémentaire |
Style de combat | Armes à feu dominantes | Mélange armes/poings | Bagarres à mains nues stylisées |
Ton général | Semi-sérieux | Comique assumé | Farce cartoonesque |
Le film qui clôture cette décennie dorée, “Cul et chemise” (1979), transpose leur formule en Afrique. Hill y incarne un aventurier tandis que Spencer joue son demi-frère mécanicien. Ensemble, ils affrontent des braconniers sans scrupules. Ce film illustre parfaitement l’évolution de leur cinéma: les westerns ont définitivement laissé place à des comédies d’action où l’environnement change mais où la dynamique reste identique. Le public, fidèle, continue de répondre présent, faisant de chaque sortie un événement populaire dans toute l’Europe.

L’évolution de leur formule comique: des westerns aux comédies urbaines
Au cours des années 70, la formule Hill-Spencer s’affine considérablement. Si les premiers films étaient encore tributaires des codes du western spaghetti, la transition vers la comédie pure devient de plus en plus évidente. Les scénarios, initialement assez élaborés, se simplifient pour se concentrer sur l’essentiel: mettre les deux héros dans des situations permettant d’exploiter au maximum leur alchimie comique.
Cette évolution est particulièrement visible dans le traitement des scènes de combat. Dans les premiers westerns, les fusillades occupaient encore une place importante. Progressivement, les armes à feu disparaissent presque complètement au profit des poings. Les bagarres deviennent l’attraction principale, véritables morceaux de bravoure où la chorégraphie prend des allures cartoonesques. Le son caractéristique des coups, volontairement exagéré, devient une signature sonore immédiatement reconnaissable.
Un élément marquant de leur cinéma est la représentation des antagonistes. Contrairement à beaucoup de films d’action de l’époque, les méchants chez Hill et Spencer sont rarement menaçants ou terrifiants. Ils forment plutôt une galerie de personnages caricaturaux: mafieux ridicules, policiers corrompus incompétents, riches exploiteurs arrogants. Cette approche permet de maintenir un ton léger même dans des situations théoriquement dangereuses.
Le film “Un génie, deux associés, une cloche” (1975), produit par Sergio Leone lui-même, représente une tentative intéressante de revenir aux racines du western spaghetti tout en incorporant l’humour qui avait fait le succès de Trinita. La présence de Damiano Damiani à la réalisation apporte une touche plus sophistiquée à ce western qui reste néanmoins dans la lignée comique développée par le duo.
Avec “Aujourd’hui, on se marie” (1976), le duo s’essaie à la comédie romantique, prouvant sa capacité à explorer différentes facettes du genre comique. Si le film n’a pas marqué les esprits autant que leurs comédies d’action, il témoigne de leur volonté de ne pas se cantonner à une formule trop répétitive, même si le public les réclamait principalement dans des rôles de bagarreurs.
La fin des années 70 voit leur formule atteindre sa perfection avec “Deux super-flics” (1977) et sa suite “Pair et Impair” (1978). Ces films constituent l’apogée de leur art: les scènes d’action sont spectaculaires sans jamais être violentes, l’humour omniprésent mais jamais vulgaire, et leur complicité à l’écran n’a jamais été aussi évidente. Le cinéma de Hill et Spencer est désormais un genre à part entière, immédiatement reconnaissable et adulé par un public fidèle.
L’impact culturel: un phénomène européen et mondial
Si le duo Terence Hill-Bud Spencer a connu un succès phénoménal en Italie, leur pays d’origine, leur impact a largement dépassé les frontières italiennes pour devenir un véritable phénomène culturel à l’échelle européenne. En France, en Allemagne, en Espagne et dans les pays de l’Est, leurs films ont attiré des millions de spectateurs en salles et sont devenus des piliers de la programmation télévisuelle.
L’Allemagne représente probablement le pays où leur popularité a atteint des sommets inégalés. Les films du duo y ont bénéficié d’un doublage particulièrement inventif qui a souvent ajouté une couche supplémentaire d’humour. Des générations entières d’Allemands ont grandi avec leurs aventures, au point que des festivals leur sont encore régulièrement consacrés. En 2016, l’annonce du décès de Bud Spencer a provoqué une véritable onde de choc dans le pays, témoignant de l’attachement profond du public allemand envers ce duo.
En France, leurs films ont longtemps été des incontournables de la programmation télévisée du dimanche après-midi, créant une tradition familiale autour de leurs aventures. La sortie de chaque nouveau film était un événement, et des films comme “On l’appelle Trinita” ou “Deux super-flics” ont attiré des millions de spectateurs en salles. L’expression “film de baston” est d’ailleurs souvent associée à leur cinéma dans la culture populaire française.
Dans les pays de l’Est, alors sous régime communiste, les films de Hill et Spencer représentaient une rare fenêtre sur la culture occidentale. Leur humour sans prétention et leurs personnages sympathiques passaient plus facilement le filtre de la censure que d’autres productions hollywoodiennes. En Hongrie, en Pologne ou en Tchécoslovaquie, ils sont devenus des icônes populaires, symboles d’une forme de liberté et d’insouciance.
- En Italie: figures emblématiques du cinéma populaire national
- En Allemagne: culte transgeénérationnel avec fan-clubs actifs
- En France: tradition familiale du dimanche après-midi
- Dans les pays de l’Est: symboles d’une culture occidentale accessible
- Au Japon: influence sur certains mangas et animes comiques
- En Amérique du Sud: popularité durable, notamment au Brésil
Un aspect fascinant de leur impact culturel réside dans l’influence qu’ils ont exercée sur d’autres formes d’expression artistique. Des réalisateurs comme Quentin Tarantino ont cité leur cinéma comme une source d’inspiration, notamment pour le traitement des scènes d’action empreintes d’humour. Dans le domaine des jeux vidéo, on peut également déceler leur influence dans certaines productions qui mêlent bagarres exagérées et humour cartoonesque.
Leur style unique a également contribué à l’émergence d’un sous-genre cinématographique: la comédie d’action européenne. Des productions comme les films de Jean-Paul Belmondo dans les années 70-80 ou plus récemment la franchise “Taxi” portent l’empreinte de cette approche où l’action spectaculaire se marie à l’humour sans jamais verser dans la violence graphique. En ce sens, Hill et Spencer ont contribué à définir une alternative européenne au film d’action hollywoodien.
Pays | Particularité de la réception | Films particulièrement populaires | Héritage culturel |
---|---|---|---|
Italie | Fierté nationale | Série des Trinita | Références fréquentes dans la culture pop |
Allemagne | Doublage créatif ajoutant de l’humour | Deux super-flics, Pair et Impair | Festivals dédiés, jeux vidéo (Bud Spencer & Terence Hill: Slaps and Beans) |
France | Tradition télévisuelle dominicale | On l’appelle Trinita, Cul et chemise | Expression “film de baston” dans le langage courant |
Pays de l’Est | Rare fenêtre sur l’Occident | Les films des années 70 | Influence sur le cinéma post-communiste |
L’impact de leur œuvre perdure aujourd’hui encore, notamment grâce aux plateformes de streaming qui permettent aux nouvelles générations de découvrir leurs aventures. En 2018, le jeu vidéo “Bud Spencer & Terence Hill: Slaps and Beans” a connu un succès inattendu, prouvant que leur univers continue de séduire bien au-delà de leur époque. Des documentaires comme “Lo chiamavano Bud Spencer” (2017) explorent l’héritage de ce duo exceptionnel, tandis que des rétrospectives sont régulièrement organisées dans les cinémathèques européennes.
En 2025, plus de cinquante ans après leurs premiers succès, les films de Terence Hill et Bud Spencer continuent de rassembler les générations devant le petit écran. Leur cinéma, dépourvu de vulgarité et de violence gratuite, offre un divertissement universel qui traverse les époques sans prendre une ride. En ces temps où le cinéma d’action se fait souvent plus sombre et violent, la légèreté et l’optimisme de leurs aventures apparaissent comme un antidote bienvenu à la morosité ambiante.
Des personnages iconiques: la construction d’une mythologie populaire
Au fil de leurs nombreuses collaborations, Terence Hill et Bud Spencer ont développé des personnages aux traits distinctifs immédiatement reconnaissables, véritables archétypes qui constituent aujourd’hui une part importante de leur héritage culturel. Bien que leurs noms changent d’un film à l’autre, les caractéristiques fondamentales de leurs personnages restent remarquablement constantes, contribuant à créer une cohérence dans leur filmographie.
Le personnage incarné par Terence Hill se distingue par son apparence soignée, ses yeux d’un bleu perçant et son sourire malicieux. Généralement plus rusé et calculateur que son partenaire, il préfère éviter les confrontations quand c’est possible, mais se révèle redoutable lorsqu’il est acculé. Son style de combat est caractérisé par la rapidité et l’agilité, avec une signature visuelle forte: une série de claques rapides, presque impossibles à suivre à l’œil nu. Son attrait pour les femmes et sa tendance à l’esbroufe constituent des ressorts comiques récurrents.
Bud Spencer, quant à lui, incarne la force tranquille. Massif et barbu, souvent vêtu simplement, son personnage préfère généralement la tranquillité mais devient une véritable force de la nature quand il est provoqué. Son style de combat est direct et spectaculaire: coups de poing dévastateurs, utilisation d’objets du décor comme armes improvisées, et son fameux “martèlement” sur la tête des adversaires. Sa gourmandise légendaire et son apparente nonchalance constituent des éléments comiques récurrents dans leurs films.
La dynamique entre ces deux personnages repose sur un contraste évident tant physique que comportemental, mais aussi sur une profonde complicité qui transparaît à l’écran. Leurs chamailleries constantes, ponctuées de répliques cinglantes, masquent mal l’affection qui les lie. Cette relation, qui évoque celle de nombreux duos comiques classiques comme Laurel et Hardy, constitue le véritable cœur émotionnel de leurs films.
Un élément fascinant de cette mythologie populaire réside dans l’évolution des personnages à travers leur filmographie. Si dans les premiers westerns, leur relation était parfois teintée de méfiance ou d’opportunisme, elle évolue vers une amitié indéfectible dans les comédies urbaines des années 70 et 80. Cette progression reflète d’ailleurs l’amitié réelle qui s’est développée entre les deux acteurs au fil des tournages.
Les antagonistes qui leur font face contribuent également à définir cette mythologie. Généralement présentés comme des figures archétypales (le riche exploiteur, le mafieux ridicule, le policier corrompu), ils servent avant tout de faire-valoir au duo. Leur défaite spectaculaire est inévitable, souvent ponctuée de scènes de bagarre mémorables où ils sont projetés à travers les décors dans des cascades improbables.
Le film “L’Invincible Rocco“, bien que moins connu que d’autres de leurs collaborations, illustre parfaitement cette construction mythologique. On y retrouve tous les ingrédients qui ont fait leur succès: Terence Hill y joue un personnage malin et débrouillard, Bud Spencer incarne la force tranquille, et leur collaboration improbable les mène à triompher face à des adversaires socialement privilégiés mais moralement corrompus.
Les années 80: entre renouvellement et essoufflement de la formule
Les années 80 marquent une période contrastée pour le duo Terence Hill-Bud Spencer. Si leur popularité reste intacte au début de la décennie, plusieurs facteurs vont progressivement conduire à un essoufflement de leur formule et à une diminution du nombre de leurs collaborations. Cette période n’en reste pas moins intéressante, avec quelques films qui comptent parmi leurs plus appréciés.
“Qui trouve un ami trouve un trésor” (1981) ouvre cette nouvelle décennie sous les meilleurs auspices. Réalisé par Sergio Corbucci, spécialiste des westerns spaghetti reconverti dans la comédie, ce film d’aventures situé sur une île du Pacifique reprend tous les ingrédients qui ont fait le succès du duo: bagarres spectaculaires, quiproquos, et cette complicité unique qui transparaît à l’écran. Le film connaît un succès commercial important, prouvant que la formule fonctionne encore parfaitement.
L’année suivante sort “Banana Joe” (1982), qui présente la particularité d’être centré uniquement sur le personnage de Bud Spencer, Terence Hill étant absent du casting. Ce choix témoigne d’une volonté des deux acteurs de développer également des carrières solo, tout en maintenant leur collaboration sur d’autres projets. Cette tendance se confirmera tout au long de la décennie, avec des périodes plus longues entre leurs films communs.
“Quand faut y aller, faut y aller” (1983) marque leurs retrouvailles à l’écran dans une comédie d’action qui les voit incarner deux demi-frères héritant d’une propriété en Floride. Le film reprend la formule éprouvée mais commence à montrer des signes d’essoufflement créatif. Les critiques, généralement peu tendres avec leurs productions, se font plus acerbes, pointant une certaine répétitivité dans les situations et les gags.
- “Qui trouve un ami trouve un trésor” (1981) – Aventure insulaire
- “Banana Joe” (1982) – Solo de Bud Spencer
- “Quand faut y aller, faut y aller” (1983) – Retrouvailles en Floride
- “Double Trouble” (1984) – Dérive vers la comédie pure
- “Miami Supercops” (1985) – Retour à la formule policière
- “Superflic se déchaîne” (1988) – Une des dernières collaborations de la décennie
Plusieurs facteurs expliquent cet essoufflement progressif. D’une part, le cinéma populaire italien entre dans une crise profonde au milieu des années 80, concurrencé par les productions hollywoodiennes et la montée en puissance de la télévision. Les budgets se réduisent, rendant plus difficile la réalisation de scènes d’action spectaculaires qui faisaient partie intégrante de leur succès. D’autre part, après plus de quinze films ensemble, le risque de répétition devient réel.
Terence Hill commence parallèlement à développer ses ambitions en tant que réalisateur. Avec “Don Camillo” (1983), il passe derrière la caméra tout en tenant le rôle principal, démontrant sa volonté d’explorer d’autres aspects du cinéma. Bud Spencer, quant à lui, continue à tourner dans des productions solo comme “Superflic” (1980) ou “Le Shérif et les