
L’acuité visuelle est une notion complexe qui détermine notre capacité à percevoir des détails fins. Mais que recouvre exactement ce concept ? Qu’est-ce que le “pouvoir séparateur” de l’œil ? Pourquoi certains yeux voient-ils mieux que d’autres ? Cet article vous explique tout ce qu’il faut savoir sur ce paramètre essentiel de notre vision.
Commençons par définir précisément le concept d’acuité visuelle :
Ainsi, l’acuité visuelle traduit la capacité de notre système visuel à séparer et donc distinguer deux stimuli lumineux très proches, qu’il s’agisse de points, de traits ou de détails dans une lettre par exemple. Plus cet angle minimum de résolution est petit, meilleure est l’acuité visuelle.
L’acuité visuelle dépend de nombreux facteurs. Certains sont liés aux propriétés inhérentes de notre œil, d’autres à des troubles visuels ou même à notre environnement. On peut citer :
Ainsi, de nombreux paramètres interviennent pour déterminer notre capacité à résoudre des détails fins. Heureusement, certains peuvent être améliorés via une correction par des verres ou par la chirurgie. Voyons maintenant plus en détail les bases scientifiques de l’acuité visuelle.
La capacité de notre œil à distinguer deux points dépend en réalité de deux phénomènes principaux :
En raison de la diffraction, l’image d’un point n’est jamais ponctuelle mais légèrement “étendue” sur la rétine : on parle de tache de diffraction. Son diamètre dépend de la longueur d’onde de la lumière et du diamètre de la pupille.
Ainsi, deux points distincts projetteront deux taches de diffraction sur la rétine qui pourront se chevaucher. On considère qu’ils sont résolus si les centres de ces taches sont espacés d’au moins la moitié de leur rayon. C’est ce qu’on appelle le critère de Rayleigh.
Cet angle minimum sous-tendant deux points résolus définit donc l’angle minimum de résolution (MAR) de l’œil. Plus il est faible, meilleure est l’acuité visuelle ! L’expression mathématique de cet angle fait intervenir la longueur d’onde de la lumière et le diamètre de la pupille.
Mais la résolution ne dépend pas que de l’optique ! Il faut aussi que la rétine puisse “échantillonner” correctement les deux points. Concrètement, les photorécepteurs doivent être suffisamment nombreux et rapprochés pour distinguer les deux taches.
On appelle cela le critère de Nyquist : il faut au moins photorécepteurs par tache de diffraction sur la rétine. Or la densité des cônes au niveau de la fovéa, qui assurent la vision centrale, est très élevée : de 100 000 à 300 000 cônes par mm
C’est ce qui permet une résolution aussi fine. Néanmoins, entre la diffraction et la densité maximale des photorécepteurs, l’acuité visuelle normale de l’être humain reste limitée à environ 20/10 (vision de rapace !). Examinons maintenant comment on quantifie l’acuité visuelle.
En pratique, l’acuité visuelle se mesure grâce à des tests normalisés qui font appel à des lettres ou des symboles de tailles décroissantes. Le patient doit identifier des lettres ou motifs de plus en plus fins, ce qui permet de déterminer le pouvoir séparateur de son œil.
Historiquement, on utilise une échelle dite en dixièmes. Une acuité de 10/10 est jugée normale (angle MAR de minute d’ar:
Mais on peut atteindre une acuité supérieure à la normale, jusqu’à 20/10, voire 30/10 pour des yeux exceptionnels !
Pour faciliter les calculs statistiques, on utilise plutôt une échelle logarithmique called logMAR (pour logarithmic Minimum Angle of Resolution). Là, c’est l’inverse : plus le nombre est élevé, plus l’acuité est mauvaise !
Il existe aussi des échelles pour évaluer la vision de près, essentielle pour lire par exemple. L’échelle de Parinaud est couramment utilisée :
Cette notation peu parlant au grand public. Sachez simplement que plus le chiffre est bas, meilleure est l’acuité de près. Un examen de la vision de près est essentiel après 40 ans pour dépister la presbytie.
De nombreuses solutions permettent de regagner en acuité visuelle si celle-ci n’est pas optimale. Les principales sont :
A côté de ces solutions curatives, il est essentiel de préserver son capital visuel par un mode de vie sain : ne pas fumer, bien dormir, limiter les expositions aux écrans, etc.
De même, au moindre doute, n’hésitez pas à consulter un ophtalmologiste pour réaliser un dépistage précoce de potentiels troubles visuels, avant qu’ils ne deviennent handicapants.
Terminons par un aspect plus concret : quel lien entre notre acuité visuelle et les écrans que nous utilisons au quotidien ? Sont-ils bien adaptés à notre vision ? Quelles résolutions et tailles d’écran choisir ?
Actuellement, la résolution des meilleurs smartphones atteint les 1000 pixels par pouce, soit une distance inter-pixel de seulement 25 microns environ. Or nous avons vu que l’acuité visuelle moyenne permet de distinguer un détail de l’ordre de 60 microns (minute d’arc à 30 cm).
Autrement dit, la résolution des smartphones dépasse déjà les capacités de discrimination de notre système visuel dans les conditions courantes d’utilisation ! Passer à une résolution supérieure n’amènerait aucun bénéfice visuel.
Concernant les écrans d’ordinateur, tablettes et téléviseurs, tout dépend de la distance à laquelle on se place pour les regarder :
Ainsi, pour un téléviseur 4K de 80 pouces (200 cm de diagonale) situé à 3 mètres, nous ne pourrions théoriquement pas exploiter toute la résolution disponible (qui descend à 100 microns). Mais cela reste pertinent car nous ne regardons que rarement la TV en vision centrale pure.
En conclusion, il est inutile pour la majorité des utilisateurs d’investir dans des écrans 8K à des distances classiques. Mieux vaut miser sur la diagonale et le confort visuel !