Le réalisateur de The Last Jedi glisse une référence subtile à Star Wars dans Knives Out 3

NathanDivertissement13 décembre 2025

Il y a des clins d’œil qui cherchent l’applaudissement, et d’autres qui se glissent dans le tissu même d’un film, presque comme une couture invisible. Dans Wake Up Dead Man: A Knives Out Story (souvent appelé, par facilité, Knives Out 3), Rian Johnson place une référence à Star Wars qui ne sert pas seulement à flatter le spectateur attentif : elle devient un petit test moral, un prisme ironique à travers lequel le film regarde son époque.

Un auteur de saga… qui préfère les labyrinthes

Rian Johnson appartient à cette catégorie rare de cinéastes capables de naviguer entre le blockbuster et le film à mécanique fine sans perdre leur signature. Son passage sur Star Wars: The Last Jedi a cristallisé une réception passionnelle, parfois violente, comme si la saga n’était plus seulement un objet culturel mais un espace de croyance, de fidélité, et de schisme. Johnson, lui, semble avoir retenu une leçon simple : dans les mythes populaires, la narration est un terrain de lutte.

Ses Knives Out, eux, se présentent comme des divertissements de haute précision : des intrigues qui s’auto-commentent, des personnages qui se trahissent en parlant, et un détective (Benoit Blanc) qui traverse les discours comme on traverse des décors en carton-pâte. Ce cadre-là autorise Johnson à injecter du présent, y compris sous forme de références pop, mais à condition qu’elles servent l’architecture du récit.

Le clin d’œil Star Wars : drôle, oui… mais surtout révélateur

La référence en question surgit dans un échange où un influenceur réactionnaire en quête de pouvoir, Cy Draven, compare sa situation à celle de la Rébellion de Star Wars. Sur le papier, c’est un gag : l’inversion morale est si flagrante qu’elle provoque un rire nerveux. Mais la portée du moment est plus aiguë. Johnson utilise la blague comme une observation : tout le monde aime se raconter qu’il est le rebelle, même quand il cherche à renforcer des structures d’oppression.

En mise en scène, ce type de réplique fonctionne comme un insert invisible : il ne coupe pas la dynamique, il la condense. Sans qu’on quitte la fiction, le film pointe la rhétorique contemporaine — celle qui recycle les mythes de liberté pour justifier des entreprises cyniques. La puissance du clin d’œil vient de là : il ne dit pas “regardez, je connais Star Wars”, il dit “regardez ce que Star Wars est devenu dans la bouche de certains”.

La pop culture comme thermomètre, pas comme décoration

Johnson se montre généralement prudent avec les références datées, parce qu’un film peut se retrouver prisonnier de ses clins d’œil comme d’un vieux fil d’actualité. Ici, il fait un choix plus élégant : la référence n’est pas un bibelot, c’est un symptôme. Elle caractérise Cy Draven, révèle son imaginaire, et dessine une critique du présent sans discours appuyé. C’est une écriture “à l’oreille”, au sens musical : elle attrape un air du temps et le détourne.

Cette manière de doser rappelle un problème de montage : trop de signes, et l’attention se disperse; trop peu, et le film perd son ancrage. Johnson cherche l’équilibre, la petite aspérité qui rend la scène plus vraie. Pour les créateurs qui travaillent aussi le rythme et la clarté — y compris en dehors de la fiction — certaines règles se recoupent : intention lisible, information hiérarchisée, et sens du tempo. Sur ce point, on retrouve des principes voisins de la fabrication de contenus, comme le détaille cet article sur la création vidéo et les bonnes pratiques pour optimiser des contenus : au fond, il s’agit toujours de guider le regard sans l’écraser.

Religion, croyance, récit : le pont secret avec The Last Jedi

Ce qui rend ce clin d’œil plus intéressant, c’est le terrain sur lequel il tombe. Wake Up Dead Man n’est pas seulement un puzzle policier : le film explore la religion comme institution, comme langage, et surtout comme instrument. Un révérend au tempérament ambigu, Jud Duplenticy, est envoyé dans une communauté ecclésiale fermée, dirigée par un monsignore qui exerce une autorité moins spirituelle que politique. À mesure que l’intrigue se déplie, la foi apparaît autant comme refuge que comme arme.

Impossible, alors, de ne pas penser au geste de The Last Jedi, film hanté par une crise de croyance : la figure du maître, la faillite de l’ordre, la question de la transmission. Dans la galaxie lointaine, la religion prend la forme d’un ordre mystique; dans Wake Up Dead Man, elle s’incarne dans une institution localisée, sociale, sordide parfois. Mais le même fil traverse les deux récits : qu’est-ce qu’on fait quand la structure censée porter le sens devient un appareil de pouvoir ?

Star Wars comme “religion culturelle”

Johnson a déjà suggéré que Star Wars fonctionne pour beaucoup comme une foi de l’enfance : un mythe fondateur, une grammaire morale, un réservoir d’images. Et c’est précisément pour cela que sa réplique sur la “Rébellion” frappe juste. Quand un mythe devient universel, il est récupérable par tous, y compris par ceux qui contredisent ses valeurs. Le film saisit ce moment de bascule avec une ironie sèche : on peut citer la Rébellion tout en rêvant d’Empire.

D’un point de vue esthétique, ce n’est pas une démonstration; c’est une modulation. Johnson ne charge pas la scène d’un discours explicatif. Il laisse la contradiction exister, parce que le spectateur, déjà saturé de ces glissements rhétoriques, la reconnaît instantanément.

Une galerie de personnages comme champ de forces

Le film installe une constellation de figures (fidèles, proches, notables, opportunistes) qui gravitent autour du monsignore Jefferson Wicks. Ce type de dispositif est typique du whodunit moderne : il ne s’agit pas seulement de trouver “qui a fait quoi”, mais de comprendre qui parle à partir de quelle place. Chez Johnson, la langue est un indice. Les personnages se trahissent moins par leurs gestes que par leur manière de se raconter.

Le clin d’œil à Star Wars s’inscrit dans cette logique : il révèle le personnage comme un être de slogan, nourri d’images héroïques prêtes à l’emploi. En ce sens, la référence agit presque comme un accessoire de costume, mais un accessoire mental : elle habille la pensée.

Le pouvoir de la chaire : mise en scène de la domination

Dans un récit centré sur une église repliée sur elle-même, la chaire devient une scène — au sens théâtral. La parole “sacrée” est mise en jeu comme performance, intimidation, aimantation. Johnson filme (et écrit) la religion non comme un mystère, mais comme un système de discours : qui a le droit de dire, qui doit écouter, qui est désigné comme intrus.

Et lorsque le film oppose, implicitement, la théorie à l’empathie — la théologie comme échappatoire contre le besoin humain immédiat — il reprend un motif déjà présent dans son cinéma : le moment où l’intelligence seule ne suffit plus, où il faut regarder quelqu’un souffrir “ici et maintenant”. C’est l’un des endroits où le film gagne en densité : il transforme le mécanisme policier en question morale, sans quitter la logique du genre.

Ce que la référence dit de notre époque : tout le monde veut être “le camp du bien”

La grande réussite du clin d’œil, c’est sa précision politique sans lourdeur. Il met à nu un réflexe contemporain : la bataille pour l’imaginaire. Dans l’espace public, les récits comptent autant que les faits — parfois plus. S’approprier un mythe, c’est s’arroger une légitimité. Se dire “rebelle”, c’est déjà tenter de gagner la scène.

On pourrait presque lire cette mécanique comme un enjeu d’infrastructure : qui contrôle la circulation, qui possède la plateforme, qui maîtrise la distribution du message. À un niveau très différent mais conceptuellement voisin, les questions de contrôle et de performance existent aussi dans le numérique : la domination passe souvent par l’architecture. Pour prolonger cette idée de “coulisses” et de maîtrise des moyens, on peut lire cet article sur les raisons qui poussent certains à choisir un serveur dédié — un autre domaine, mais une même obsession : posséder son environnement plutôt que le subir.

Rian Johnson : l’art de rester dans le présent sans y être prisonnier

Le risque, lorsqu’un film s’ancre explicitement dans l’actualité (influenceurs, rhétoriques politiques, guerres culturelles), c’est de perdre en durée de vie. Johnson le sait. Sa solution consiste à faire du contemporain non un catalogue de signes, mais une matière dramatique. Le présent sert le conflit, pas l’inverse.

C’est aussi ce qui distingue une référence utile d’un clin d’œil gratuit : elle doit modifier la scène. Ici, la comparaison à la Rébellion n’est pas une parenthèse; elle redessine les rapports de pouvoir, elle révèle une stratégie de narration interne au personnage. Le film devient alors une sorte de miroir : non pas “regardez Star Wars”, mais “regardez comment on s’en sert”.

Le cinéma de Johnson, entre puzzle et commentaire social

Depuis Brick et Looper, Johnson aime les systèmes : des règles, des pièges, des boucles. Mais il filme aussi les histoires comme des instruments de classe, de domination, de réputation. Dans les Knives Out, la mécanique policière est un prétexte idéal : elle permet d’exposer des milieux, de faire parler les masques, d’observer comment la vérité se négocie.

Cette approche n’est pas sans écho avec d’autres récits sériels très ancrés dans des lieux et des mythologies fortes : quand une fiction revient hanter ses propres décors, elle parle autant de mémoire que d’intrigue. À ce titre, il est intéressant de rapprocher cette idée de “retour sur un lieu” de certains univers télévisuels. Pour un parallèle sur la puissance narrative des espaces, cet article sur un retour marquant à un lieu lié à Breaking Bad offre une autre porte d’entrée : comment un décor devient un argument dramatique.

Ce qui fonctionne, ce qui divise : la délicate cohabitation du ludique et du grave

Wake Up Dead Man joue sur deux registres : le plaisir du jeu (indices, retournements, masques sociaux) et une matière plus sombre (religion instrumentalisée, violence symbolique, emprise). Le défi, pour Johnson, est de faire cohabiter ces tonalités sans que l’une neutralise l’autre. Le clin d’œil à Star Wars participe de cette tension : il fait sourire, mais il n’est pas confortable.

Ce mélange peut diviser. Certains spectateurs attendent d’un Knives Out une légèreté plus constante, une ironie plus décorative. D’autres, au contraire, apprécient que le film risque le malaise, qu’il rappelle que les intrigues “ludiques” parlent souvent de rapports de force bien réels. Tout dépend de la façon dont on accepte qu’un film de genre fasse aussi office de commentaire sur la parole publique.

Le sens du détail : un cinéma qui s’écrit aussi en arrière-plan

Johnson excelle dans l’art de faire passer des informations sans souligner. La référence à Star Wars est un exemple, mais la méthode est plus large : accessoires signifiants, répliques à double fond, micro-rythmes dans les scènes de groupe. C’est un cinéma qui “déduplique” presque ses idées : une même information circule sous plusieurs formes, pour renforcer un thème sans répétition frontale. Dans un tout autre champ, la logique rappelle certains enjeux d’optimisation — comme l’explique cet article sur l’optimisation et la déduplication : enlever le redondant, conserver l’essentiel, rendre le système plus lisible.

Fin ouverte : et si le vrai sujet était notre besoin de mythes ?

Le clin d’œil à Star Wars n’est pas seulement un cadeau aux fans : c’est une question posée au spectateur. Quand un personnage moralement douteux s’approprie le vocabulaire de la Rébellion, le film ne ridiculise pas seulement ce personnage; il pointe notre dépendance aux récits simples, aux camps identifiables, aux étiquettes héroïques. Ce que Johnson semble interroger, film après film, c’est peut-être ceci : dans un monde saturé d’histoires, qui raconte, au nom de quoi, et pour gagner quoi ?

Et si la subtilité de la référence tenait là, finalement : moins un signe adressé aux initiés qu’un rappel discret que les mythes populaires ne sont jamais neutres — ils vivent, se déplacent, se retournent, parfois contre ceux qui pensaient les posséder.

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